Superviseur exécutif du Concours Eurovision de la chanson
Le superviseur exécutif du Concours Eurovision de la chanson est la personne désignée chaque année par l'UER pour s'assurer que tous les aspects de la production du Concours Eurovision de la chanson soient conformes au règlement. Il est également délégué officiellement sur place par l'Union, afin de valider les résultats du vote[1]. Depuis 1964, neuf personnes se sont succédé à ce poste : six hommes et trois femmes.
Rôles
Le premier rôle du superviseur est de superviser l'ensemble de la production du Concours Eurovision de la chanson, de la victoire jusqu'à la conclusion de la finale, l'année suivante. Il aide ainsi le diffuseur hôte à organiser tous les aspects du concours, depuis la rédaction du règlement jusqu'à l'accueil des délégations étrangères. Il fixe le calendrier de la production et les échéances à respecter[2].
Son deuxième rôle est de veiller au respect des règles du concours, ainsi qu'à la bonne réputation et l'image de celui-ci[2]. Ainsi, il peut décider de la disqualification d'une chanson sélectionnée, si par exemple, elle a été commercialisée avant la date fixée par le règlement. Il agit alors en concertation avec le Groupe de Référence de l’UER[3].
Son troisième rôle est de présider au bon déroulement de la procédure de vote. Il doit s'assurer que les points sont correctement attribués et il valide les résultats des demi-finales et de la finale, selon les informations que lui transmet le partenaire commercial de l'UER pour le télévote[3]. En cas de panne technique durant la procédure de télévote ou si un nombre insuffisant de télévotes a été enregistré dans un pays, le superviseur peut décider d’employer uniquement les votes du Jury national[4]. Enfin, en cas d’ex aequo pour la première place en finale, il est chargé de mettre en œuvre la procédure prévue par le règlement et d'ainsi désigner le vainqueur[5].
Historique
En 1964, pour la toute première fois, l'UER délégua sur place un superviseur, en l’occurrence Miroslav Vilcek. Celui-ci fut chargé de surveiller le déroulement du vote et d'en contrôler les résultats[6]. Avec son assistante, il prit place sous le tableau de vote et donna le signal de départ de la procédure. Il intervint à deux reprises. Premièrement, pour faire ajouter sur le tableau, un vote de l'Italie à l'Espagne, qui avait été oublié. Deuxièmement, pour faire répéter au porte-parole espagnol l'attribution de la note maximale, les applaudissements du public l'ayant empêché d'entendre le nom du pays bénéficiaire[1].
L'édition 1967 du concours marqua la première intervention importante d'un superviseur. La procédure de vote se termina sur une confusion majeure de la présentatrice, Erika Vaal. Celle-ci oublia d'appeler le dernier jury, le jury irlandais, et annonça donc à contretemps la victoire du Royaume-Uni. Le superviseur, Clifford Brown, dut alors la reprendre : « Still waiting for the Irish vote ! ». Erika Vaal s'excusa et appela Dublin. Le porte-parole du jury irlandais répondit à ses salutations, par ces mots : « I thought we were going to be left out ! » Le public applaudit alors vivement[7].
L'édition 1969 du concours connut le premier arbitrage d'un superviseur quant aux résultats du vote. Jusqu'à l'antépénultième jury, le Royaume-Uni et la France se disputèrent en effet la première place. Le jury français attribua 6 votes aux Pays-Bas et le jury portugais, 2 votes à l'Espagne et à la France. Ces trois pays affichèrent 18 votes chacun et le Royaume-Uni, 17. Le résultat final sembla dépendre du dernier jury, le jury finlandais. Mais celui-ci attribua 1 vote au Royaume-Uni et le reste, à l'Irlande, la Suède et la Suisse. Le tableau afficha un ex aequo de 18 points, sous les cris et les applaudissements prolongés du public espagnol dans la salle. La présentatrice, Laurita Valenzuela, se tourna vers le superviseur, Clifford Brown, qui lui confirma : « Il y a en effet quatre gagnants cette année, quatre ex aequo.» S'ensuivit un dialogue en français, entre eux :
– Laurita Valenzuela : Mr. Brown ? Qu'est-ce que je fais avec le prix ?
– Clifford Brown : Vous devez le donner aux quatre gagnants !
– L.V. : Est-ce que vous pouvez répéter ? Répétez, s'il-vous-plaît !
– C.B. : Il faut simplement donner aux quatre, car il y a quatre gagnants.
– L.V. : Quatre gagnants ? Donc, j'appelle les quatre gagnants ?
– C.B. : Oui !
– L.V. : Bon, merci.
Le règlement du concours ne prévoyait pas à l'époque de procédure pour trancher un ex aequo. Cela explique la décision du superviseur de déclarer tous les quatre, vainqueurs, l’Espagne, la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni[8].
En 1984, pour la première fois, la présentatrice et le superviseur échangèrent quelques plaisanteries entre eux. Désirée Nosbusch présenta en effet Frank Naef comme ayant tout pouvoir. Elle ajouta même : « He can do almost everything with me. Frank, please, don't ! » Elle l'apostropha ensuite en français, en le tutoyant : « Frank, ça y est ? On y va ? Ou tu crois que tu dois déjà me stopper pour la première fois ? » Frank Naef lui répondit alors : « Chère Désirée, en réponse à tes aimables paroles, je t'offre le premier circuit, celui de Suède.[9] »
En 1985, après l’entracte, la présentatrice, Lill Lindfors, fit son retour sur scène, vêtue d’une robe verte. Le bas de sa robe se détacha alors, la laissant en slip blanc. Le public poussa des cris de surprise. Apparemment paniquée, Lill Lindfors fit plusieurs gestes désespérés à l’attention de la régie, afin que les caméras ne cadrent que son buste. Mais soudain, elle déplia le drapé de ses épaules et se retrouva toute vêtue de blanc. Le public se mit à rire et à applaudir. S’approchant du micro, Lill Lindfors dit : « I just wanted you to wake up a little. » Il s’agissait en réalité d’une plaisanterie, demeurée secrète jusqu’au bout et qui n’avait même pas été répétée. Le bas de la robe de Lill était attaché à un fil, qui fut tiré par un technicien en coulisses. Le superviseur, Frank Naef, n’apprécia que fort peu cette plaisanterie. Quant à son épouse, elle en fut tout simplement choquée[10].
En 1988, Frank Naef devint le tout premier superviseur à recevoir une ovation spéciale. Les présentateurs rappelèrent qu’il exerçait sa fonction pour la dixième fois. Il fut vivement applaudi et l’orchestre joua la partition d’Happy Birthday to You. À Pat Kenny, Frank Naef répondit : « Well, Pat, I feel great. And, at the same time, I’m very happy to be in Dublin, this time, on this occasion, because, really, with the Millenium being celebrated, it’s a great day for me. Thank you.[11]»
L'édition 1991 fut marquée par le record d'interventions jamais enregistré de la part d'un superviseur durant une retransmission. Frank Naef dut en effet intervenir une vingtaine de fois durant la procédure de vote pour corriger les erreurs des présentateurs, Gigliola Cinquetti et Toto Cutugno. En réalité, ni Cinquetti, ni Cutugno ne maîtrisaient les deux langues officielles de l'UER, l'anglais et le français. Tous deux rencontrèrent par conséquent des difficultés pour les prononcer et les comprendre[12]. De plus, la procédure connut un hiatus important, lorsque la communication avec Ankara fut impossible à établir. Toto Cutugno s’impatienta et pressa Frank Naek de passer au pays suivant. Celui-ci lui répondit que la porte-parole turque était bien en ligne et que le problème était causé par une absence de retour sonore dans la salle. Au final, le superviseur dut énoncer lui-même les points du jury turc. Enfin, pour la deuxième fois dans l’histoire du concours, après 1969, le vote se conclut sur un ex aequo. La France et la Suède avaient en effet obtenu chacune 146 points à l'issue du vote. Le superviseur décida alors de mettre en application la règle ad hoc, introduite en 1989. Il fit procéder au décompte des "douze points". Il apparut alors que la France et la Suède en avaient reçu chacune quatre. Le superviseur décompta alors les "dix points". La France en avait reçu deux et la Suède, cinq. Par conséquent, la Suède fut proclamée vainqueur[12]. Ce fut la toute première fois que le vainqueur fut désigné en recourant à la règle des ex aequo et à l'arbitrage du superviseur[13].
En 1992, Frank Naef annonça officiellement son départ à la retraite durant la retransmission. Les présentateurs rappelèrent qu’il officiait depuis quinze ans. Frank Naef les remercia et félicita très chaleureusement la télévision publique suédoise pour son efficacité et son accueil. Il conclut en remerciant ses deux plus proches collaborateurs, qui l’avaient secondé depuis 1977 : Marie-Claire Vionnet et Brian Fraser. Il reçut alors un bouquet de fleurs des mains de la chanteuse suédoise Carola[14]. Frank Naef officia en réalité pour la dernière fois lors de la présélection pour l'édition 1993 du concours, Kvalifikacija za Millstreet. Le vote de cette présélection fut décidé entièrement par un jury de professionnels, présent sur place, à Ljubljana, la ville hôte. Ce jury fut présidé par Frank Naef. Aux salutations de la présentatrice, Tajda Lekše, il répondit par de très vifs remerciements, au nom de l'UER, à la télévision publique slovène pour l'excellence de la production et la perfection de l'organisation[15]. Frank Naef apparut pour la toute dernière fois à l'écran, durant la retransmission de l'édition 1993. La présentatrice, Fionnuala Sweeney, débuta la procédure de vote en le saluant et la caméra fit un bref plan sur lui. Il demeure toujours le superviseur resté le plus longtemps en fonction, ayant officié sans interruption de 1978 à 1992, soit une période de quatorze années[16].
En 1996, pour la toute première fois, le superviseur délégué par l'UER fut une femme. Il s'agit de la française Christine Marchal-Ortiz[17].
En 2003, pour la première fois, le superviseur remit le trophée de la victoire à l'artiste gagnant. Accompagnée du maire de Riga, la ville hôte, Gundars Bojārs, Sarah Yuen offrit en mains propres la récompense à la gagnante turque, Sertab Erener[18].
Récapitulatif par année
Références
- ↑ 1,0 et 1,1 KENNEDY O’CONNOR John, The Eurovision Song Contest. 50 Years. The Official History, Londres, Carlton Books Limited, 2005, p.24.
- ↑ 2,0 et 2,1 http://www.rts.ch/video/emissions/court-du-jour/4565443-superviseur-executif-concours-de-la-chanson-eurovision-uer-ang.html
- ↑ 3,0 et 3,1 Règles du Concours Eurovision de la chanson 2013, p.2, par l'Union européenne de radio-télévision, publié sur le site officiel du concours (www.eurovision.tv/page/baku-2012/about), consulté le 1er mai 2013.
- ↑ Règles du Concours Eurovision de la chanson 2013, op.cit., p.3.
- ↑ Règles du Concours Eurovision de la chanson 2013, op.cit., p.4.
- ↑ http://www.eurovision.tv/page/history/by-year/contest?event=281#About%20the%20show
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., p.30.
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., p.36.
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., pp.97-98.
- ↑ KENNEDY O'CONNOR John, op.cit., p.102.
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., p.114.
- ↑ 12,0 et 12,1 http://www.eurovision.tv/page/history/by-year/contest?event=307#About%20the%20show
- ↑ FEDDERSEN Jan & LYTTLE Ivor, Congratulations. 50 Years of The Eurovision Song Contest. The Official DVD. 1981-2005, Copenhague, CMC Entertainement, 2005, p.12.
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., p.130.
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., p.133.
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., p.134.
- ↑ http://www.eurovision.tv/page/history/by-year/contest?event=311#About%20the%20show
- ↑ KENNEDY O’CONNOR John, op.cit., p.175.
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