Muséologie à Liège
La ville de Liège constitue un centre important dans le développement de la muséologie en Belgique.
Historique
Naissance et développement de la muséologie à l'Université de Liège
C’est en 1969, suite à une réforme du programme des cours que le premier cours de muséologie est créé à l'Université de Liège. Cette évolution s’inscrit dans le développement croissant de la discipline au niveau international. Cette nouvelle charge est revenue à une praticienne, Lucie Ninane, qui était chef de travaux aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Cet enseignement était proposé aux étudiants en histoire de l’art, archéologie et musicologie sous forme de cours libre. Toutefois, des problèmes de santé ont empêché Lucie Ninane d’assurer régulièrement ce cours de muséologie[1].
En 1976, le cours est réorganisé et devient un cours à option. André Marchal, inspecteur des musées pour le compte du Ministère de la Culture, est chargé de la suppléance. Il est finalement nommé en tant que chargé de cours à temps partiel en 1983. Dépassant la muséologie de l’époque trop souvent réduite à l’historiographie des musées, il s’inspire de Georges-Henri Rivière pour élargir cette discipline. Parallèlement à l’histoire des musées, il développe ainsi des considérations sur l’exposition et sur la conservation. Au cours d’une réforme des programmes, son cours libre de muséologie se transforme en cours obligatoire pour les étudiants en histoire de l’art et de l’archéologie. Par ailleurs, André Marchal crée également un cours libre de muséographie pour compléter l’approche sur un mode plus pratique en matière d’aménagement des musées, tout en faisant profiter les étudiants de sa grande expérience en ce domaine[2]. André Marchal contribue donc grandement à développer l’enseignement de la muséologie.
Le séminaire de muséologie et le DES
Après la mise à la retraite d'André Marchal en 1988, c’est André Gob qui reprend le flambeau en assurant le cours de muséologie[3]. Archéologue de formation, il a eu l’occasion de collaborer pour la première fois avec André Marchal lors de la conception du Musée de la Préhistoire à Ramioul (l'actuel Préhistomuséum). Appréciant l’approche muséographique de ce dernier, il va s’appliquer à maintenir vivace « l’esprit Marchal » dans l’enseignement de la muséologie à Liège[1]. Toutefois, dans la décennie des années 1990, André Gob est en réalité très peu présent à l’Université de Liège car il occupe des fonctions administratives externes pour le compte de celle-ci. En 1996, il est finalement nommé chargé de cours à l’Université de Liège. À la fin des années 1990, il revient à temps plein en faculté de philosophie et lettres et en octobre 1999, il engage une assistante : Noémie Drouguet. Dès lors, un embryon de service de muséologie, dénommé « séminaire de muséologie », voit le jour à Liège[4],[3]. Ce séminaire a également renoué à partir de 1999 avec la pratique muséographique, indispensable aux yeux d’André Gob à l’enseignement de la muséologie[1]. Cette évolution toujours croissante s’inscrit dans un contexte international où la muséologie connaît un développement dans de nombreuses formations académiques. Ce phénomène est à mettre en lien avec la création de la « nouvelle muséologie » qui accordait davantage de place à l’exposition et au public au sein des musées[1].
Tout cela aboutit finalement au développement de nombreux cursus spécialisés un peu partout, dont à l’Université de Liège. En 2001, cette dernière crée, en collaboration avec deux autres universités belges (UNamur - l’Université de Namur et UCLouvain - l’Université catholique de Louvain), le diplôme inter-universitaire d’études spécialisées (DES) en gestion du patrimoine culturel qui comporte une orientation en muséologie. L’Université Libre de Bruxelles (ULB) ne tarde pas à prendre également part à cette aventure. Il s’agit alors d’une formation de troisième cycle s’inscrivant dans le prolongement du master en histoire de l’art et de l’archéologie. Cet enseignement a ainsi la particularité de ne plus être réservé exclusivement aux historiens de l’art et de l’archéologie. Dans cette nouvelle formation, les étudiants suivaient une formation spécifique de 180 heures de muséologie ainsi qu’un important stage pratique. En 2003, les premiers étudiants liégeois du DES en muséologie sortent diplômés. On retrouve parmi eux, non pas seulement des historiens de l’art, mais aussi des historiens, architectes et sociologues. Ce phénomène témoignait ainsi d’une autonomisation de la muséologie par rapport aux autres disciplines universitaires[2],[3]. L’orientation en muséologie de ce DES, réalisable en une année, repose sur une introduction et sur cinq cours consacrés à des questions spéciales. Cette formation est alors assurée pendant plusieurs années par cinq professeurs : Ignace Vandevivere (UCLouvain), Pierre-Jean Foulon (UNamur), André Gob (ULiège), Nathalie Nyst (ULB) et Monique Renault (ULB)[5],[6].
Le processus de Bologne et la création du master en muséologie
Le processus de Bologne sonne le glas du système DES et de cette coopération interuniversitaire. Le décret de la Communauté française du 31 mars 2004 oblige les universités à intégrer la muséologie dans un master[7]. Ce DES en orientation muséologie est néanmoins accessible jusqu’en 2006 tandis que l’année académique 2006-2007 est maintenue, de façon à assurer une transition avant son intégration dans un master. Cette dernière année de transition est toutefois modifiée et transformée en une seule orientation regroupant la muséologie et l'animation patrimoniale. Les cinq questions spéciales de muséologie sont maintenues à travers le cours de musées et art contemporain (donné par Pierre-Jean Foulon - UNamur), le cours de musée et société (donné par André Gob - ULiège), le cours d’études de cas (donné par Pierre-Jean Foulon et André Gob), le cours du musée entre l’État et le marché (donné par François Mairesse – Musée de Mariemont) et le cours des musées d’ethnographie (donné par Nathalie Nyst – Communauté française et ULiège). De son côté, l’ULB avait décidé d’arrêter sa participation à ce DES depuis 2005-2006[8]. C’est donc au cours de l’année académique 2007-2008 que la muséologie à Liège devient officiellement et en pratique une filière spécialisée du master en histoire de l’art et de l’archéologie. Cette spécialisation est toutefois ouverte aux autres étudiants d’autres formations grâce aux passerelles[7].
Ce master en muséologie à l’Université de Liège est le seul master de ce type proposé en Belgique. Il se démarque notamment par la réalisation obligatoire d’un stage de longue durée (2 à 3 mois) dans un musée belge ou à l’étranger[9].
Parallèlement à cet enseignement, un pôle de recherche a été mis en place à Liège avec la création d’un doctorat en muséologie en 2004. Le premier docteur en muséologie à sortir de cette formation est Noémie Drouguet en octobre 2007[9]. Suite à la réforme de Bologne, ce doctorat est rattaché à l’école doctorale « Histoire, art et archéologie ». Plusieurs thèses sont alors en rapport avec un programme de recherche mené en partenariat avec l’Université du Québec (UQAM) et le professeur Raymond Montpetit. Cette collaboration transatlantique aboutit en octobre 2007 à un colloque se déroulant à Liège. De cette rencontre internationale sur la muséologie aboutit trois conventions de collaboration bilatérale entre l’Université de Liège et l’UQAM, l’Université de Bourgogne et l’Université d’Avignon. Ces partenariats débouchent, entre autres, sur des échanges d’étudiants, des séminaires communs et des échanges de professeurs. Par ailleurs, cette coopération ne s’est pas limitée à une dimension internationale puisque le séminaire de muséologie travaille notamment en collaboration avec l’école supérieure des Arts Saint-Luc de Liège (section de conservation-restauration) par rapport à la conservation préventive[10].
Arrivée en juillet 2018 en Belgique, Manuelina Maria Duarte Cândido prend la succession d’André Gob et devient la responsable de la finalité spécialisée en muséologie pour le master en histoire de l’art et archéologie de l’Université de Liège. Originaire du Brésil, elle a notamment été professeur de muséologie de l’Université fédérale de Goiás et directrice de l’Institut Brésilien des Musées. À travers son enseignement en Belgique, elle espère sortir du schéma traditionnel européen et partager les réalités patrimoniales et muséales brésiliennes très différentes des conceptions européennes. Elle souhaite ainsi mettre en avant une muséologie sociale, très présente au Brésil, qui s’attacherait à l’étude d’initiatives muséales émanant d’un groupe ou d’une communauté locale porteuses de mémoire[11].
Notes et références
- ↑ Revenir plus haut en : 1,0 1,1 1,2 et 1,3 Gob 2004, p. 53.
- ↑ Revenir plus haut en : 2,0 et 2,1 Gob 2004, p. 53-54.
- ↑ Revenir plus haut en : 3,0 3,1 et 3,2 Gob 2009, p. 85.
- ↑ Entretien de Benoît Leysten avec André Gob le 26 avril 2019 à l’Université de Liège
- ↑ « Programme des cours 2003-2004 », sur https://www.programmes.uliege.be (consulté le )
- ↑ « Programme des cours 2005-2006 », sur https://www.programmes.uliege.be (consulté le )
- ↑ Revenir plus haut en : 7,0 et 7,1 Gob 2009, p. 85-86.
- ↑ « Diplôme d'études spécialisées interuniversitaire en étude et gestion du patrimoine culturel », sur https://www.programmes.uliege.be (consulté le )
- ↑ Revenir plus haut en : 9,0 et 9,1 Gob 2009, p. 86.
- ↑ Gob 2009, p. 86-87.
- ↑ « Présentation de Manuelina Maria Duarte Cândido », sur https://www.uliege.be (consulté le )
Voir aussi
Bibliographie
- André Gob, « Muséologie », Art & fact, no 23, , p. 53-54 (ISSN 0774-1863)
- André Gob, « Le séminaire de Muséologie a dix ans ! », Art & fact, no 28, , p. 85 (ISSN 0774-1863)
Article connexe
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