Tribus arabes d'Algérie
Jusqu'au VIIe siècle, l'Algérie était majoritairement peuplée par différentes populations berbères.[réf. nécessaire] À la suite de l'expansion de l'Islam, l'Algérie a connu trois vagues migratoires arabes successives qui bouleverseront, comme le dit Ibn Khaldoun, la démographie et le paysage socio-culturel de la région: les invasions militaires accompagnés des élites politiques et commerçantes arabes qui s'installèrent majoritairement dans les grandes villes au VIIe siècle, ensuite les invasions hilaliennes (Beni Hilal, Beni Sulaym et Banu Maaqil) au XIe siècle qui conquièrent les zones rurales, notamment les plaines, puis pendant la même période, en parallèle, la migration des arabes andalous (Maures) venus d'Espagne qui contribueront activement à l'arabisation du pays. Selon Gabriel Martinez, les Arabes andalous seront les "chiens de garde" de la langue arabe[1].
Par conséquent, si la première vague migratoire arabe engendra une arabisation du corps tribal "par le haut", la deuxième vague migratoire opéra quant à elle une arabisation "par le bas".
À l'aube de la colonisation française de l'Algérie, le pays est alors peuplé majoritairement de tribus arabes[Information douteuse], dans lesquelles certaines tribus berbères se sont fondues dans le cadre de confédération tribale, ainsi que de tribus berbères. Toutefois, les Arabes et les Berbères ne formant pas deux ethnies différentes, mais seulement deux groupes linguistiques distincts, il est plus juste de parler d'une population arabo-berbère[2].
Préambule
D'un point de vue historique, une tribu consiste en une formation sociale existant préalablement à la formation de l'État. C'est une communauté fondée sur des codes communs, ayant un système politique commun, des croyances religieuses et une langue communes, et tirant primitivement leur origine d'une même souche.
Certains ethnologues utilisent le mot tribu pour désigner les sociétés organisées sur la base des liens de parenté, spécialement des familles ayant une même ascendance. Ainsi, plusieurs clans familiaux vivant sur un même territoire.
Une société segmentaire est en anthropologie un modèle de société divisée sur plusieurs niveaux hiérarchiques en de nombreuses composantes similaires, opposées entre elles à chaque niveau mais intégrées dans un niveau supérieur. Le modèle segmentaire a été appliqué à de nombreuses sociétés, notamment du Maghreb.
Dans l’Algérie médiévale, le pouvoir tribal repose sur une cohésion interne des rapports sociaux, et sur le respect d'une hiérarchie horizontale : (partage des ressources, démocratie directe...), sous l'égide d'un chef charismatique à la fois décideur et arbitre. La formation tribale, attachée à son autonomie, parfois vivant en autarcie, est par principe anti-étatique.
Selon les affirmations des généraux français, inscrites dans leurs mémoires, l’Algérie comptait 1200 tribus[5]. L'ordre tribal au temps de l’Algérie ottomane avait une cohérence et pouvait être vu comme un système assez complexe et fonctionnel. Il fut bouleversé par les transformations induites par le régime colonial. Dès lors, il y eut un démantèlement de cet ordre tribal, entre le début de la Conquête de l'Algérie par la France en 1830 et la Première Guerre mondiale[6].
Celui-ci s’est effectué de plusieurs manières, soit par destruction physique, par dépossession foncière, ou en discréditant les structures d’autorité traditionnelles et en imposant de nouvelles normes culturelles au peuple autochtone[6]. La colonisation française a éliminé la tribu pour mettre en place des douar-communes, simples rouages de l'État colonial[7]. Malgré toutes les tentatives de destruction, le système tribal subsista. Il a cependant perdu progressivement toute force coercitive pour l'individu[7].
Les grandes enquêtes réalisées lors du Sénatus Consulte de 1863 montraient, par l'extrême confusion des traditions orales recueillies, l'impossibilité de distinguer chacun des deux groupes arabe et berbère, car l'islamisation et l'arabisation du pays avaient entraîné toute une série de reconstructions généalogiques mythiques[2]. Le système tribal notamment avaient facilité progressivement, la fusion des deux éléments arabe et berbère[2]. En effet, la tradition orale n'a guère retenu que le nom des grands ancêtres fondateurs et souvent les tribus se sont restructurées autour de personnages religieux (les Marabouts[8]) ou de personnages guerriers (Djouad)[8],[7].
Tribus et clans arabes algériens notables
Arabes citadins (premières implantations)
Les Arabes citadins constituent la première implantation des tribus arabes au Maghreb, et ce dès le VIIe siècle :
- Les Banu al-Aghlab (Aghlabides) des Banu Tamim sont une tribu arabe originaire du Nord de l'Arabie venue en Algérie en amont des grandes invasions hilaliennes.
- Les Banu Al-Akhdarî (Lakhdarides) des Quraysh sont une tribu arabe originaire de la région du Hedjaz présente en Algérie depuis le IXe siècle.
- Les Banu Fihr (Fihrides), famille aristocratique arabe issue du clan des Quaraysh. Cette famille s'installa dès le VIIe siècle au Maghreb (dans le Cyrénaïque, l'Ifriqyia et aux alentours de Biskra et à al-Andalus, à la suite des conquêtes du général Oqba ibn Nafii al-Fihri dans lesquelles elle joua un rôle de premier plan notamment jusqu'à la fin du VIIIe siècle. Les membres de cette famille ont particulièrement marqué l'histoire du Maghreb et de l'Andalousie, notamment Abu Obeida al-Fihri, Yusuf al-Fihri, Habib al-Fihri, Abd al-Rahmane al-Fihri I, Abd-al-Rahmane al-Fihri II.
- Les tribus Chorfas des Sulaymanides et des Idrissides issus des Banu Hachim, entre le VIIIe et le Xe siècle.
Arabes bédouins (secondes implantations)
Si la première migration arabe vers le Maghreb au VIIe siècle lors des premières conquêtes était essentiellement composée de nobles clans arabes sédentarisés en nombre plus restreint, la deuxième vague quant à elle est beaucoup plus conséquente en ce qu'elle était majoritairement composée de tribus nomades.
L'objectif des Fatimides était triple: rétablir la vassalité des Zirides, peupler le Maghreb jusqu'alors insuffisamment exploité et renverser la tendance démographique afin que les Berbères ne soient plus majoritaires. La tribu originelle des Banu Hilal est alors composée de trois fractions, elles-mêmes constistuées en sous-factions :
- Athbedj : Doreid (Drid), Taouba, Bokhtor, Kherfa, Dahhak, Iyad, Latif ;
- Riyāh : Mohammed, Mirdass, Sinber, Dhouaouda ;
- Zoghba : Malek, Yezid Amer, Suwayd...
Lors de leur migration vers le Maghreb, les Banu Hilal sont joints par trois autres groupes tribaux arabes :
- Jochem : Qorra, al-Assem, Moqaddem, Kholt, Sofiane, Djaber ;
- Maqil : Hedadj, Kharadj, Chebanat, Ghosl, Metarfa, Thaleba, Ahlaf ;
- Sulaym : Zoghb, Heïb, Aouf, Kaoub, Hakim, Debbab, Ouchah, Djouari.
De plus, comme le précise Ibn Khaldoun, on cite aussi parmi elles la tribu de Rebiâ, mais nous ne connaissons à présent aucune peuplade de ce nom, à moins que ce soit celle qu’on appelle les Maaqil, ainsi que le lecteur verra plus tard. Avec la tribu de Hilal, il entra en Ifrikya une foule mélangée, composée d’Arabes appartenant aux tribus des Fezara et d’Achedja (branches de celle de Ghatafan), de Jusham Ibn Muawya Ibn Bakr Ibn Hawazin, de Seloul Ibn Morra Ibn Sâasâa Ibn Muawya, d’El-Maqil, branche de la grande famille des Arabes yéménites, d’Aniza Ibn Asad Ibn Rebiâ Ibn Nizar, de Thawr ibn Muawya Ibn Abbada Ibn Rabi'a el Bekka Ibn Amer Ibn Sâasâa, d’Adouan Ibn Omar Ibn Qaïs Aylan, et de Matrud, famille de a tribu de Fahm Ibn Qays. Mais toutes ces fractions de tribu étaient, pour ainsi dire, englobées dans la tribu de Hilal et surtout dans la tribu-branche d’El-Athbedj, parce que cette famille exerçait le commandement sur toutes les autres lors de leur entrée eu Ifrikya."[9]
Aussi, bon nombre de tribus zénètes musulmanes, partageant également le même mode de vie nomade, se sont fondus dans "l'essaim" hilalien. Par conséquent, la qualification d'arabe de ces tribus se justifie par une dominance de l'arabité — par la filiation patrilinéaire, l'adhésion à une confédération tribale dominée par un clan arabe, la prédominance des mœurs et coutumes bédouines et naturellement la primauté de la langue arabe — dans un même groupe très généralement composé de certains groupes berbères. Ce faisant, si l'on s'en tient essentiellement à la dimension ethnique, il s'agirait de tribus arabo-berbères où la composante culturelle arabe, bédouine notamment, prédomine.
L'afflux des Hilaliens fut un facteur majeur dans l'arabisation linguistique, culturelle et ethnique du Maghreb et dans la propagation du nomadisme dans les domaines où l'agriculture avait précédemment dominé. Les estimations en termes de déplacement de populations arabes dès le XIe siècle varient selon les historiens entre 200 000 et 1 000 000[10],[11]. Selon Luis del Mármol Carvajal les hilaliens auraient été plus d'un millions à immigrer, et il estime la population hilalienne à son époque a 1 000 000[12],[13] en 1573.
Le juriste et officier français Louis Rinn qui était affecté au Bureaux arabes du Constantinois en 1864, revient sur les travaux de Marmol dans son ouvrage Le Royaume d'Alger sous le Dernier Dey en ces termes : "Il faut remarquer que quelques-unes des évaluations de détail, fournies par Marmol, sont données par lui en termes précis ; d’autres sont présentées comme un minimum. Pour certaines tribus les chiffres manquent ; quelquefois Marmol a donné le nombre des cavaliers et indiqué vaguement celui des fantassins.
Enfin, il faut admettre encore, dans une appréciation aussi sommaire, des omissions dont l’ardeur lui-même n’a pas eu conscience. Le chiffre total doit donc être augmenté d’une quantité correspondante à ces diverses causes d’atténuation. Les chiffres qui précèdent fournissent le moyen de déterminer approximativement la force numérique de la population arabe, dans toute l’étendue du Maghreb, au XVIe siècle. En effet, en ajoutant à ces chiffres le quart de leur valeur, pour tenir compte des atténuations et des omissions que je viens de signaler, on obtiendra des nombres qui représenteront la population armée dans chacun des états.
En ajoutant à ces nombres celui des hommes non armés, savoir : les vieillards, les marabouts, les infirmes, les pauvres, nombre que j’ai reconnu, par d’autres études, être approximativement du quart de la population armée, on obtient le chiffre de la population virile adulte. Or, d’après les tables de mortalité, la population virile adulte dans les états musulmans représente le tiers de la population totale. Il suffira donc de tripler ce nombre pour avoir la population des deux sexes. En appliquant ces divers calculs aux nombre fixés ci-dessus, c’est-à-dire en ajoutant,
1. Pour les atténuations et les omissions: 1/4
2. Pour les hommes non armés: 1/4 Total: 1/2 |
on trouve que la population virile adulte des tribus arabes était représentée approximativement au XVIe siècle par les nombres ronds suivants :
Maroc: 1,000,000
Algérie: 300,000 Tunis et Tripoli: 250,000 Total: 1,550,000 |
Par conséquent, la population totale de sang arabe, répartie à cette époque dans les états du Maghreb, peut être évaluée approximativement ainsi qu’il suit[3][réf. à confirmer] :
Pour le Maroc: 3,000,000
Pour l’Algérie: 900,000 Pour Tunis et Tripoli: 750,000 Total: 4,650,000" |
Tribu | Clan | Factions (Zmala) | Sous-factions | Localisations |
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Banu Hilal[18],[19] |
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Banu Maqil |
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Banu Sulaym[110],[111],[112] |
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Chorfa |
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Autres | Mitidja: Hadjoutes [121] |
Cartographies
Notes et références
- ↑ « (Gabriel Martinez-Gros dans collections 55 daté avril - juin 2012, Il était une fois les Berberes) », sur ImgBB (consulté le )
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- ↑ 3,0 et 3,1 Le Royaume d'Alger sous le Dernier Dey, Alger [lire en ligne], p. 32
- ↑ Abd al-Rahman b Muhammad Ibn Khaldun, Histoire des berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale, Imprimerie du Gouvernement, [6r9NKIC&newbks=0&printsec=frontcover&hl=fr lire en ligne (page consultée le 2022-12-21)], p. 196
- ↑ « Hadjout : Le passé de la tribu des Hadjoutes revisité », sur El-watan-dz.com, (consulté le ).
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- ↑ 8,0 et 8,1 L'Algérie assimilée. Étude sur la constitution et la réorganisation de l'Algérie. Par un Chef de Bureau arabe, [lire en ligne (page consultée le 2022-12-21)], p. 61
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- ↑ « De la tribu à la ville : un essai d’approche « régressive » de l’histoire du peuplement de la région de Tébessa »
- ↑ Charles Dezobry, Dictionnaire général de biographie et d'histoire, de mythologie, de géographie ancienne et moderne..., Dézobry, E. Magdeleine et Cie, [lire en ligne (page consultée le 2023-02-21)], p. 29
- ↑ Ernest (1808-1890) Fonction indéterminée Carette et Auguste (1810-1875) Fonction indéterminée Warnier, « Carte de l'Algérie divisée par tribus / par MM. E. Carette et Auguste Warnier ; Membres de la Commission Scientifique de l'Algérie », sur Gallica, (consulté le )
Articles connexes
- Berbères, Histoire des Berbères
- Tribus de Kabylie
- Liste de groupes touaregs
- Liste des tribus chaouies
- Peuples et tribus berbères (en)
- Tribus du Maroc
- Tribus de Tunisie
- Ethnologues : Slimane Rahmani (1893-1964), Thérèse Rivière (1901-1970), Germaine Tillion (1907-2008), Marceau Gast (1927-2010), Camille Lacoste-Dujardin (1929-2016), Pierre Bourdieu (1930-2002), Joëlle Mitleman
- Tribus d'Arabie
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