Jean de Barrau
Jean Marie Pierre Henri de Barrau, né à Rodez le , mort au front le (à 24 ans an) à Loudrefing[1], est un militant de l'Action française. Il fut étudiant à l'Institut électrotechnique de Grenoble, membre du comité directeur de la Fédération nationale des Camelots du roi, puis, un peu moins de six mois, secrétaire de Philippe d'Orléans, le prétendant orléaniste, avant d'être mobilisé et d'être porté disparu sur le front le premier jour de bataille.
Militant d'Action Française et camelot du roi
On ne connaît les éléments de la biographie de Jean de Barrau que par deux sources militantes :
- Un article écrit dans L'Action française du 30 juin 1913[2] par Maurice Pujo, fondateur des Camelots du roi.
- L'ouvrage Figures rouergates : Jean et Paul de Barrau, Henri Fabre de Montbez, Paul Fabre morts au Champ d'Honneur, publié en 1919 par Henri Bedel, secrétaire général de l'Action Française pour l'Aveyron, consacré à ses quatre amis disparus[3].
Dans sa jeunesse, il fonde à Rodez un groupe royaliste[4].
Durant ses études à l'Institut électrotechnique de Grenoble (1908 à 1910), il fonde avec des camarades une section d'Action française[5].
Appelé en octobre 1910 pour son service militaire au 139e régiment d'infanterie à Aurillac, il y retrouve Maxime Réal del Sarte[2].
En novembre 1911, il est affecté comme élève-officier au 13e régiment d'infanterie stationné à Nevers. Il assiste avec son uniforme à une réunion de l'Action française à Paris, ce qui lui vaut à son retour de permission d'être rayé du peloton des élèves-officiers et puni de 20 jours de prison. Il est renvoyé au Puy-en-Velay avec son grade de caporal au 86e régiment d'infanterie[4].
Le 14 mars 1913, il participe à la manifestation du Manège du Panthéon, à Paris, où les Camelots du roi chargent les manifestants antimilitaristes. Henri Bedel raconte cette journée d'après la correspondance de Jean de Barrau :
"Le vacarme devenant trop fort, et les dispositions ayant été prises dans l'autre salle, deux équipes fraîches, dirigées par Lucien Lacour et Maxime Réal del Sarte, débouchent subitement dans le café. Jean [de Barrau] saute en bas de sa table, et après une sommation de Marius Plateau le "travail commence" ! Ça ne dure que trois minutes, mais ce fut chaud ! Les triques, les casse-têtes, les chaises, les bouteilles, les poings américains, entrèrent dans une effroyable danse. Un instant après, et je suis encore à me demander comment, les Camelots étaient seuls dans le café. Ils se congratulaient sur une vraie litière de vitres brisées, de chapeaux défoncés, de lambeaux de toutes sortes... [...]. Dès les premiers coups, un malheureux était venu rouler littéralement sur nos pieds. Il perdait le sang par une orbite et par une oreille. Nous l'avons tiré vers un angle, nous l'avons essuyé avec nos mouchoirs, qui étaient absolument ruisselants de sang. Nos manchettes même en étaient pleines. Après la bataille, les Camelots l'ont encore épongé, lui ont fait boire un petit verre et l'ont remis, à la porte, entre les mains de ses amis plus ou moins éclopés, qui stationnaient encore là."[4].
Toujours en 1913, il interpelle à la sortie des classes, M. Fontanié, professeur de lettres au lycée de Rodez où il avait été élève, l'accusant, par ses écrits antimilitaristes, d'avoir été la cause de sanctions prises contre des soldats réfractaires et il lui donne une gifle. L'incident est relaté dans les journaux Le Matin[6], L'Express du Midi du 29 juin 1913 et en première page de L'Action française du 30 juin 1913 par un article signé de Maurice Pujo[2].
Il est convoqué devant le juge de paix de Rodez mais refuse de se présenter et fait lire un communiqué : "Les enseignements de notre illustre maître Charles Maurras, les exemples des Vezins, des del Sarte, des Maurice Pujo, des Lacour, ont pour la première fois depuis un siècle fait passer l'ardeur et la confiance de vaincre, de gauche à droite [...]. Ma génération, Monsieur le juge, génération d'Action Française, génération des Camelots du roi, n'est pas d'humeur à accepter ces hommes-là [les antimilitaristes]. Les maîtres de plus en plus écoutés que nous suivons avec fierté, les Maurras et les Vaugeois, et les Pujo, nous ont appris à mettre au service de la raison patriotique la violence victorieuse."[4].
En novembre 1913, il est nommé au comité directeur de la Fédération nationale des camelots du roi[4].
Secrétaire du duc d'Orléans (10 février 1914 - 2 août 1914)
Le 10 février 1914, il est engagé comme secrétaire par le prétendant orléaniste Philippe d'Orléans (1869-1926). Il séjourne en Belgique, auprès de celui-ci, installé au manoir d'Anjou, jusqu'à son départ pour la guerre le 2 août 1914[4].
Dans sa correspondance avec sa famille, il relate des moments passés au service du prince, des rencontres avec des personnalités qui viennent voir Philippe d'Orléans, son rôle entre le prétendant en exil et l'Action française durant son service auprès de celui-ci[4].
Dans la préface de l'ouvrage d'Henri Bedel, un religieux nommé Dom Besse, O.S.B., écrit : "J'ai eu la joie de rencontrer Jean de Barrau, pendant qu'il était en Belgique, au service de Monseigneur le duc d'Orléans. Le prince lui témoignait une affectueuse bienveillance. Son caractère et son dévouement lui plaisaient ; il appréciait surtout sa piété simple et franche. "Vous, Barrau, vous avez de la religion ; je vous estime", lui dit-il en ma présence. Quelques jours auparavant, le 1er mai, fête de la Saint-Philippe, le prince et son secrétaire avaient passé une demi-heure en prières dans une église de Bruxelles. Rien ne faisait plaisir à Jean autant que les manifestations de foi vive auxquelles Monseigneur le duc d'Orléans se livrait volontiers avec lui."[4].
Félibre
Jean de Barrau est cité en 1915 dans un article du journal Le Mémorial d'Aix comme félibre mort pour la France[7] ainsi que dans la liste des vingt-quatre félibres morts au champ d'honneur donnée dans La Revue Mondiale en 1917[8].
Henri Bedel le mentionne comme félibre mainteneur (adhérent) d'une association félibréenne de la ville du Puy[4] où Albert Boudon-Lashermes (1882-1967), qui y avait restauré en 1897 les anciens Jeux Floraux du Puy sous le nom d'Escolo Felibrenco Velaienco, le nomma « cabiscol d'honneur des chevaliers de Saint-Hubert ».
Décès au front en août 1914
La mobilisation générale est décrétée le 2 août 1914, et Jean de Barrau, caporal-téléphoniste au 142e régiment d'infanterie, est porté disparu, le premier jour de combat à Bisping le 18 août 1914[9]. Il est déclaré mort pour la France le 18 août 1914 par jugement rendu le 14 avril 1920 par le Tribunal de Millau[10]. C'est sans doute pour cette raison qu'il n'a reçu aucune citation et qu'on ne trouve pas le récit de sa mort dans l'Historique du 142e Régiment d'infanterie pendant la guerre de 1914-1918, Paris, Berger-Levrault, qui retrace chaque bataille.
Henri Bedel rapporte une correspondance du 9 novembre 1916 de Philippe d'Orléans à la mère de Jean de Barrau : "9 novembre 1916. The Berystede. Ascot. Chère Madame, Le faire-part de la mort glorieuse de vos deux fils ne m'est parvenu que ces jours derniers, m'apportant, hélas ! la confirmation de toutes nos appréhensions. Je vous prie de croire à mes plus sincères sentiments de condoléances, dont vous voudrez bien traduire l'expression à Monsieur votre mari et à tous les vôtres. Mes regrets particuliers vont à la mémoire de votre fils Jean, que j'avais apprécié pendant le peu de temps que je l'ai eu auprès de moi, et auquel je m'étais attaché. Je vous baise les mains. Votre affectueux et dévoué, PHILIPPE."[4]
Publication d'un article
Jean de Barrau a écrit un article : « Les Chouans du Rouergue », publié dans l'édition aveyronnaise de l'Almanach de l'Action française de 1913[4].
Notes et références
- ↑ Monument aux morts, Gaillac
- ↑ Revenir plus haut en : 2,0 2,1 et 2,2 Article de Maurice Pujo dans L'Action française du 30 juin 1913.
- ↑ Albert Marty, L'Action française racontée par elle-même, 1986, pages 145-146.
- ↑ Revenir plus haut en : 4,00 4,01 4,02 4,03 4,04 4,05 4,06 4,07 4,08 4,09 et 4,10 Henry Bedel, Figures rouergates. Jean et Paul de Barrau, Paul Fabre, Henri Fabre de Montbez,... morts au champ d'honneur, Rodez, éditions Pierre Carrère, 1919, pages 30 à 57.
- ↑ L'Étudiant français : organe mensuel de la Fédération nationale des étudiants d'Action française, 15 décembre 1920
- ↑ « Article », Le Matin, no 10715, (lire en ligne)
- ↑ M.P, « A la mémoire de Mistral et des félibres tués », Le Mémorial d'Aix, no 20, , p. 2 (lire en ligne)
- ↑ La Revue mondiale, 1917, volume 118, page 407
- ↑ « Une famille de braves », L'Express du midi, chronique régionale, , p. 3 (lire en ligne, consulté le )
- ↑ Fiche biographique sur memorial-genweb.org
Bibliographie
- Henry Bedel, Figures rouergates. Jean et Paul de Barrau, Paul Fabre, Henri Fabre de Montbez, .. morts au champ d'honneur, Rodez, édition Pierre Carrère, 1919
- Albert Boudon-Lashermes, livret de 27 pages, 28 x 23 cm, Éloge et biographie de Jean de Barrau, secrétaire de Monseigneur le Duc d'Orléans, cabiscol d'honneur des chevaliers de Saint-Hubert, mainteneur des jeux floraux du Puy, impr. Section Action Française Le Puy, 1922
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
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